Date: Fri, 22 Feb 2002 17:18:46 +0100
From: Tristan Nitot
To: logpc@aol.com

Monsieur,

Suite à notre conversation téléphonique de ce jour avec votre collègue Ludovic Bompré, je vous écris pour vous demander un droit de réponse à l'article "HTML pour tous (4)" de Tony Pottier, paru dans Freelog N°30 qui contient un certain nombre d'inexactitudes que souhaiterais voir corrigées.

Passons sur la paternité de JavaScript (invention de Netscape, plus précisément Brendan Eich) attribué par erreur à Sun Microsystems ou d'autres détails fâcheux (comme qualifier DHTML de langage  de programmation) pour nous concentrer sur un aspect essentiel, qui est le respect des standards, dont l'auteur de l'article fait fi, au point de consacrer la première moitié de l'article à <Embed> et <Marquee>, deux tags propriétaires qui ne sont pas du HTML standard, et ne l'ont jamais été.

Tout d'abord, il faut bien comprendre que le monde des navigateurs web et du HTML a considérablement changé ces dernières années. Au tout début, le HTML très simple et n'était pas normalisé du tout. Netscape a donc créé un certain nombre de tags comme <embed> et <blink> en vue d'améliorer le langage, ainsi que JavaScript. Microsoft, avec du retard, lui a emboîté le pas en implémentant lui aussi <embed>  et JavaScript et faisant surenchère avec <marquee>. Cela a donné lieu a une "course à l'armement", chaque éditeur de navigateur ajoutant de nouvelles fonctionnalités propriétaires pour gagner des parts de marché. C'était l'époque ou chaque site arborait fièrement son logo "fonctionne mieux avec Netscape" ou "Optimisé pour Internet Explorer". Mais avec un peu de recul, tout le monde a commencé, dès 1998, à comprendre que réaliser des pages avec des tags propriétaires, c'était les rendre difficiles à lire aux utilisateurs d'un autre navigateur. Dès lors, deux possibilités se sont détachées : écrire à chaque fois deux versions (une pour Netscape 4, l'autre pour IE) ou bien utiliser seulement les tags communs aux deux navigateurs. La première approche est coûteuse, et la seconde ne permet que des sites peu attirants... Parallèlement, le W3C (World Wide Web Consortium) qui crée les standards, a proposé le HTML 4, assorti des CSS, du DOM Level 1 et du JavaScript (standardisé par l'ECMA, sous le non d'ECMAscript). Aujourd'hui, aussi bien Netscape et Microsoft font allégeance aux standards en vue de permettre une interopérabilité des documents conformes aux standards avec tout type de plate-forme. Aussi, Netscape 6.2, mais d'autres navigateurs comme Mozilla, K-Meleon, Galeon, respectent les standards et ont fait le choix de ne pas implémenter  les tags propriétaires tels que <marquee>, le W3C les ayant déclaré comme non-standards. Microsoft, avec IE 5.5 et 6.0, et bien qu'un peu en retard sur le sujet, (notamment sur CSS level 2 et les APIs du DOM), a fait des progrès considérables sur le support des standards depuis IE4.

Le défi, pour l'avenir du web, est de produire des documents conformes aux standards, pour préserver l'interopérabilité et la portabilité des documents. Par exemple, l'utilisation de <marquee> limite la consultation de la page aux utilisateurs d'IE. L'utilisation d'HTML mal codé empêche les mal-voyants équipés d'un lecteur Braille d'accéder aux pages. Enfin, il faut savoir qu'une page conforme aux standards est plus simple à écrire et moins coûteuse à maintenir (sans compter qu'elle est, le plus souvent, plus rapide a charger!)

En conclusion, pour permettre l'utilisation du web à tous les utilisateurs, quel que soit leur système d'exploitation ou leur navigateur, il est vital de réaliser des pages web conformes aux standards. Ne recommençons pas les erreurs du passé en divisant le web, alors que les standards nous permettent, dès aujourd'hui, d'écrire des pages dans l'esprit du web du début, à savoir partager l'information en en s'affranchissant des différences de configuration des uns et des autres. Comme l'indiquait Tim Berners-Lee (l'inventeur du Web) dans Technology Review, en juillet 1996 : "Quiconque appose sur une page du web un logo du type : 'Cette page est optimisée pour le navigateur X' est quelqu'un qui semble souhaiter revenir à l'époque préhistorique d'avant le web, lorsque l'on avait très peu de chances de pouvoir lire un document écrit sur un autre ordinateur, un autre traitement de texte, ou un autre réseau."

En référence, quelques URL importantes :

Vous remerciant de l'attention que vous voudrez bien accorder à ce courrier électronique,


--Tristan Nitot